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19 octobre 2009 1 19 /10 /octobre /2009 21:38

Cette pandémie a de nombreux inconvénients pour les victimes, c’est indéniable, mais les médias vont nous en parler jusqu’à plus soif dans les prochaines semaines ; aussi ai-je choisi de faire le tour de ses nombreux avantages.

 
Même le gang des barbares a eu droit à un avocat... J’ajoute que je ne prends pas d’honoraires pour assurer sa défense.
 
1. Intéressons-nous d’abord à la personnalité du présumé coupable
 
Il a eu une enfance difficile, obligé de parasiter les autres pour se nourrir, exposé aux intempéries, traînant dans les ruelles comme tous les autres virus sans famille, rejeté de tous, son identité exacte est inconnue : les USA préfèreraient l’appeler "virus de la grippe mexicaine", et les Mexicains "virus de la grippe porcine"... 
 
Aux dernières nouvelles, pour ne déplaire ni aux uns ni aux autres, il semble qu’on s’oriente vers l’appellation AH1N1, avec un petit mystère sémantique : le A signifie-t-il "américaine", "anglo-saxonne" ou "anonyme" ? Ou le simple A de l’alphabet ?
 
Qui aurait cru que la diplomatie et le politiquement correct iraient se nicher jusque sous les microscopes...
 
Et quel plus grand signe de rejet que de se voir appeler par un numéro, un matricule de prison ou de camp de concentration ?
 
Par ailleurs, l’Egypte s’est fait remarquer en commençant l’abattage de 200 000 cochons innocents... Ailleurs, on craint des représailles contre les communautés coptes ou chrétiennes sous le fallacieux prétexte qu’ils mangent du porc. La voiture tue chaque année des centaines de milliers de personnes, ce n’est pas pour autant qu’on va abattre tous les arbres à caoutchouc ! 
 
Ce virus n’a pas fait cent victimes authentifiées qu’il sème déjà la zizanie chez les humains et provoque le retour des rites sacrificiels ! 
 
Notez que ces questions de frontières sont une affaire strictement humaine : le virus s’en moque, il a déjà allègrement franchi toutes les douanes, postes de contrôle, détecteurs de métaux et listes de noms suspects... Vous voyez un faux passager des services de sécurité tirer sur un virus dans un avion ? Et même quand on en attrape un, pas question de le renvoyer chez lui, aucun pays n’en veut ! 
 
Mais tout méchant qu’il est, c’est un être vivant, qui a droit à notre compassion. C’est une créature de Dieu, une de ses plus petites : ne faut-il pas protéger les faibles ? 
 
D’un autre côté (en politique, par exemple), il est connu qu’il existe certains petits dont il faut se méfier... Je pensais à Napoléon, naturellement, pas vous ?
 
 
2. Les avantages d’un scénario catastrophe où AH1N1 serait aussi épidémique que la grippe saisonnière et aussi mortel que le virus Ebola...
 
Cette méga-catastrophe est hautement improbable - je rassure de suite les âmes sensibles.
Mais imaginons le pire. Ce serait un cataclysme, la fin de la civilisation, sinon celle de l’humanité : plusieurs générations détruites, des ruptures en cascade dans la production dans tous les domaines, un hiatus dans la transmission du savoir, le retour au Moyen Âge : un fusil mais plus de cartouches, une voiture mais plus d’essence, un ordi qui ne s’allume pas, les encyclopédies sur DVD illisibles... le chaos.
 
Pourtant, je peux vous citer des milliers d’être vivants qui seraient ravis d’un tel revers de fortune pour l’humanité : dauphins, baleines, pandas, éléphants, tous les animaux en voie de disparition feraient la fête ! Nous les avons d’ailleurs fait citer comme témoins de la défense. Et si vous voyez un chimpanzé une bouteille de champagne à la main, ne cherchez pas plus loin, il trinque à la santé du virus H1N1 !
 
La Terre elle-même ne pourrait que s’en porter mieux : en quelques décennies, la pollution, couche d’ozone, pesticides, émissions de CO2, réchauffement climatique, tous ces maux seraient enfin sur la voie de la guérison. 
 
Peut-être serez-vous étonnés d’apprendre qu’il y aurait aussi des avantages pour les humains ! Du moins pour les 5% de survivants qui, une fois le deuil fait, s’éclateraient bien : vous approchez de la cinquantaine et vous n’avez pas de Rolex ? Qu’à cela ne tienne : entrez dans une bijouterie abandonnée, mettez cinq montres à chaque poignet et une poignée de diamants à chaque oreille, il n’y aura personne à la caisse ! Vous rêvez d’une maison de maître ? Pas de problème, allez dans les beaux quartiers et réquisitionnez celle que vous voulez, personne ne viendra vous faire des histoires.
 
Vous enviez Nicolas Sarkozy invité sur le yacht de Bolloré ? Facile : allez dans une belle marina, genre Monaco, mettez-vous à la barre du yacht qui vous branche le plus, prenez un air altier de puissant et riche capitaine, et partez faire une croisière plein gaz, avec les quelques survivantes que vous aurez invitées à bord, caviar à la louche offert par le virus. La grande vie !
 
Du moins tant qu’il y aura un peu de carburant dans les réservoirs, car plus question de faire le plein nulle part... Plus de livraisons, plus de carburant, plus de marchandises, plus de bouffe dans les magasins, ou alors il faudra disputer le peu qui reste sur les rayonnages avec des arguments balistiques : courez vite revoir la saga des Mad Max, histoire de peaufiner votre stratégie de survie !
 
Pour ceux qui veulent creuser la question : "Le dernier homme", de Margaret Atwood, formidable roman, fable futuriste autant que conte philosophique sur la nature humaine, la violence qui est en nous. "Le survivant", où Charlton Heston fait ses courses dans les magasins vides d’un New-York déserté (adapté de "Je suis une légende", de R. Matheson). Ainsi que les très nombreux récits de fin du monde, plus ou moins rapide, plus ou moins radicale. "Sur ordre", de Tom Clancy , une attaque terroriste au virus Ebola contre les USA, saignant, au propre comme au figuré...
 
Bon, désolé de décevoir les dauphins et les baleines qui lisent régulièrement mes articles, mais ces scénarios catastrophes sont absolument exclus : le virus, comme tout bon parasite, ne tuera pas l’espèce hôte, la mortalité de la grippe AH1N1sera probablement d’une petite fraction de un pour cent - un peu comme la grippe saisonnière. (La mortalité lors des graves pandémies qui servent de référence n’est en fait qu’une estimation, car le pourcentage total de malades dans la population n’a jamais été connu précisément.)
 
 
3. Les avantages d’une pandémie non pas catastrophique, mais grave :
 
En politique comme aux infos télévisées, une mauvaise nouvelle chasse l’autre ! 
Et ce serait tout bénéf pour certains que nous oubliions les 40 patates accordées à Tapie (arbitrage privé auquel le gouvernement aurait pu s’opposer), Madoff et la plus grande escroquerie pyramidale de l’histoire, la crise des subprimes et les révélations en cascade sur les giga-primes, bonus et parachutes dorés. 
 
Alors que le gouvernement redoutait une crise sociale comparable à mai 68, que les patrons prisonniers se multiplient, que la pétoche qui se répand parmi les élites (selon "Le Canard", Christine Ockrent sortirait depuis peu par la petite porte), soudain le miracle pour nos dirigeants : un truc à vous mettre le trouillomètre à zéro !
 
Et que fait-on quand on crève de peur ? On se regroupe derrière le chef !
 
Notre chef qui se voyait déjà poussé vers la sortie comme un De Gaulle (ce qui, au demeurant, serait assez flatteur), devient soudain l’homme qui va diriger quotidiennement le conseil de guerre contre le virus.
 
Plus la peine de regarder "NIH" ou "24 heures" : Jack Bauer est à l’Elysée, c’est Nicolas Sarkozy qui va fumer ce virus aux anti-rétroviraux et au lance-flamme - le karcher, c’était tout juste bon pour la banlieue.
 
Cette ridicule bestiole a peut-être sauvé le capitalisme de tous les inconscients qui appellent à le réformer !
 
Je pose la question publiquement : est-ce un hasard si la grippe s’appelle en fait Influenza, un agent d’influence ?
 
A moins que quelque divinité qui aurait placé toutes ses économies chez Madoff n’ait bidouillé cette vengeance mesquine envers les pauvres pécheurs que nous sommes ? Autre hypothèse : que les nombreux scandales de prêtres pédophiles aux USA et la clémence envers les autorités qui les ont couverts n’aient fâché le Très-Haut... ce qui expliquerait sa naissance sur le sol américain.
 
Mais c’est aux sommités religieuses qu’il appartient de se prononcer sur l’hypothèse du châtiment divin, comme on l’a autrefois dit de la grande peste.
 
Quoi qu’il en soit, financiers et politiques ne seraient cette fois pas les seuls bénéficiaires de la crise : aussi curieux que ça puisse paraître, une pandémie, c’est bon pour le moral ! A l’exception des victimes ou de leurs proches.
 
Eh oui : d’innombrables témoignages ont attesté l’intensité des émotions, durant les guerres, la soif de vie qui habite l’humanité pendant et après les conflits, l’envie de bouffer, de bâfrer, d’aimer, de baiser, car demain la mort peut survenir par une bombe ou un virus... La solidarité entre voisins, entre inconnus, se manifeste comme jamais durant les grandes crises (tsunami récent, tremblements de terre). On oublie les traites à payer (le banquier est-il seulement vivant ?), les contraventions impayées, l’huissier, l’arthrose, le harcèlement au travail et toutes les misères quotidiennes. Depuis qu’on se demande si on passera l’été, l’emprunt sur 25 ans pour le pavillon nous donne moins de tracas.
 
Bref, si on survit à une pandémie, on reprend goût à la vie ! C’est pas génial ? 
 
 
4. L’hypothèse basse, la plus probable :
 
Une pandémie modeste, un virus peu virulent (!), un gagne-petit parmi les microbes, un ringard de l’inframonde.
 
Ce serait naturellement une formidable nouvelle d’un strict point de vue sanitaire, mais le risque est grand d’imaginer qu’on s’est encore fait avoir : « Tout ça pour ça ? ». 
 
Déjà hier, avant même le pic de la pandémie, il s’est trouvé des esprits forts pour dire que tout ça est bidon, qu’il s’agit d’une gigantesque manip des laboratoires pharmaceutiques pour faire monter le prix des antiviraux, ou un complot du monde de la finance pour faire oublier leurs malversations, camoufler l’incroyable rapacité d’un milieu amoral, à l’utilité sociale douteuse.
 
« Pourquoi l’OMS a-t-il haussé le niveau d’alerte à 5 alors que la grippe annuelle fait davantage de victimes chaque année ? », se demanderait-on, sachant que 6 est une sorte de grande faucheuse qui court sur la planète.
 
Même les plus rationnels, qui acceptent que la prévention doit par définition se faire avant (!), ne pourront se départir d’un léger doute : considérant qu’on nous a tellement menti en 2008, sur le marché qui s’autorégule, sur la COB et la SEC, les vigilants gardiens de la haute finance, sur le mérite des grands « managers », comment être sûrs que nos responsables disent cette fois-ci la vérité ? 
 
 
5. Il semble donc que l’on se dirige vers une pandémie modeste. 
 
Des millions de personnes n’auront donc pas la possibilité de ressentir dans leur chair l’inextinguible soif de vie des survivants d’une catastrophe : il faudra se contenter de pousser un modeste « ouf » de soulagement. Les nombreux animaux en voie de disparition prendront leur mal en patience pour attendre le prochain virus, et l’espoir d’une subite extinction de l’espèce humaine.
 
Mesdames et messieurs les jurés, ce virus AH1N1, que les médias ont désigné à la vindicte populaire, n’est qu’un petit orphelin, un immigré clandestin apatride (Mexicain, Étatsunien ?) dont aucun pays ne veut.
 
Il nous a fait très très peur ? Ne nous vengeons pas sur lui de notre propre faiblesse !
C’est un faible, un perdant si on le compare au virus HIV - un vrai tueur celui-là - doublé d’un sadique qui vous bouffe à petit feu pendant des années, avant de vous achever... Ou encore le mystérieux prion, que l’on dit capable de résister à une stérilisation de deux heures dans un four ! Ou le terrible Ebola dont on ne parle qu’à voix basse dans les laboratoires P4 de haute sécurité.
 
L’humanité admire la force sans se l’avouer et méprise la faiblesse, mais plutôt que notre instinct, écoutons la voix de notre conscience : AH1N1 ne mérite-t-il pas les circonstances atténuantes devant le tribunal de la mondialisation ?
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